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L'hydrogène, LA solution pour demain ?

hand flipping wooden cube blocks with CO2 (Carbon dioxide), chan

Ces dernières années, on entend parler de l’hydrogène comme LA solution miracle pour sauver la planète (on exagère mais trop). Pourtant, seulement 31% des français déclarent savoir très bien de quoi il s’agit.

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Plus précisément, ils perçoivent ce vecteur énergétique comme étant propre et utile pour réduire les émissions de carbone. Dans les médias, on parle également de moyens de production bas carbone, et de cette fameuse “électrolyse de l’eau”.

Mais au fait, c’est quoi l’hydrogène ? Est-ce qu’on le fabrique ? C’est quoi cette “électrolyse” dont j’entends parler de partout ?

Nous allons répondre à toutes vos questions !

Qui est le dihydrogène H2 ?

Hydrogène, dihydrogène, la même chose ?

Avant toutes chose, il faut différencier l’hydrogène et le dihydrogène. L’hydrogène H est l’atome le plus petit de l’univers et le plus simple (un proton et un électron). Pourtant, il est ultra majoritaire dans l’univers, car il représente à lui seul 75% de la masse de l’univers. Mais en fait… ce n’est pas de lui dont on va parler aujourd’hui !

Et oui, il y a un abus de langage entre l’hydrogène et le dihydrogène, qui est quand à lui composé de deux atomes d’hydrogène. C’est de lui qu’on parle aujourd’hui, qui est utilisé dans l’industrie et dans les voitures dont on entend parler à la télé. Pour simplifier la suite, nous allons suivre cet abus de langage, et nous parlerons donc “d’hydrogène” à la place de dihydrogène.

 

Présence naturelle

L’hydrogène est un gaz assez rare dans la nature. Il est principalement issu de la réaction de l’eau avec certaines roches. Le problème, c’est que cet hydrogène naturel est soit consommé par de microorganismes, soit est ventilé hors de la roche et ira réagir avec d’autres composants, ce qui le fera disparaitre.

H2 est donc un gaz très rare sur notre planète, mais peut tout de même parfois s’accumuler sous terre. Il existe donc des poches naturelles qui ont été découvertes, mais ces dernières ne suffisent pas pour répondre aux besoin de l’humanité.

Exemple : Au Mali, un puit d’hydrogène a été découvert, et ce dernier fournit une puissance de 7kW, c’est à dire 10 fois moins puissant qu’un moteur de voiture ou 500 fois moins puissant qu’une éolienne !

On comprend donc assez rapidement le problème qui entoure la production d’hydrogène : la part naturelle est encore mal estimée, et les réserves connues ne sont pas propices à une exploitation à grande échelle. Mais alors, l’Homme peut produire cet hydrogène artificiellement ?

 

La consommation d’hydrogène aujourd’hui

Pour en savoir plus sur les besoins en hydrogène de nos industries, nous vous invitons à aller faire un tour sur l’article dédié sur notre article dédié : Consommer l’hydrogène : Où ? Pour Quoi ?

Nous allons nous concentrer sur la production dédiée d’hydrogène, c’est à dire les moyens de production spécifiquement construits pour la production d’hydrogène. L’hydrogène est en immense partie produite via le Gaz naturel, le charbon, le pétrole, et d’autres moyens de production, dont l’électrolyse de l’eau dont on entend parler dans les médias, et que nous allons traiter en détail.

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Production avec du méthane (gaz naturel)

La production d’hydrogène en utilisant du méthane et de l’eau s’appelle le vaporeformage du méthane (oui oui c’est un joli petit nom). Si on ne fait pas attention, on pourrait se dire que ce mécanisme est une bonne nouvelle : il crée de l’hydrogène en consommant un gaz à effet de serre très puissant ! Mais ce n’est pas si simple que ça.

Malheureusement, le vaporeformage produit également du CO2, qui ira directement dans l’atmosphère. Et comme si cela ne suffisait pas, le processus doit se placer à 700°C pour fonctionner, il faut donc apporter beaucoup de chaleur. Aujourd’hui, on fait brûler directement du méthane pour avoir cette chaleur. Donc le méthane est combustible et réactif.

Le procédé demande donc de grandes quantités de méthane, qu’on doit donc extraire du sous sol. Ces extractions entrainent notamment des pertes (fuites), qui seront émises dans l’atmosphère.

Quand on fait les comptes, la production d’hydrogène grâce au méthane émet environ 13kg CO2e par kg d’hydrogène produit.

Production avec du charbon

Un nouveau petit nom super sympa : la gazéification du charbon. Le principe est sensiblement le même que pour le vaporeformage du méthane. En effet, on utilise du charbon (carbone pur) et de l’eau.

La véritable différence par rapport au vaporeformage, c’est que le charbon (carbone pur C), ne contient pas d’hydrogène (H), contrairement au méthane (CH4). Donc il faut presque deux fois plus de charbon que de méthane pour produire la même quantité d’hydrogène. Donc les émissions par kilogramme d’hydrogène produit sont beaucoup plus importantes.

Si on quantifie, on arrive à environ 20kg de CO2e par kg d’hydrogène produit.

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L’électrolyse de l’eau

C’est quoi l’électrolyse de l’eau ?

L’électrolyse de l’eau, c’est le fait d’utiliser de l’électricité pour casser les molécules d’eau. On forme alors du dioxygène et de l’hydrogène. Il n’y a donc pas de CO2 émis, donc pas d’émissions directes !

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Même si ce procédé est connu depuis longtemps, il ne représente aujourd’hui que 0,1% de la production mondiale d’hydrogène.

Ces constats soulèvent deux questions :

  • Pourrait-on produire tout l’hydrogène nécessaire via l’électrolyse de l’eau ?
  • Est ce que ce procédé est aussi propre qu’il en a l’air ?

Les besoins en électricité et en eau

Pour produire 1kg d’hydrogène par électrolyse, il faut 52 kWh d’électricité, soit l’énergie pour faire fonctionner un réfrigérateur standard sur deux mois. Mais alors, quelle énergie faudrait-il pour faire tout l’hydrogène produit actuellement via électrolyse ?

La réponse est 3600 TWh, c’est à dire plus de 6 fois la production annuelle française, ou 80% de la production annuelle européenne !

Cela signifie qu’il faut une quantité d’électricité supplémentaire très grande pour répondre aux besoins actuels en hydrogène. Ce n’est pas impossible à termes, mais impossible dans l’immédiat.

D’un autre côté, on peut se demander si ce moyen de production influerait sur les ressources en eau. Effectivement, le besoin en eau de l’électrolyse est supérieur au besoin en eau du vaporeformage du méthane. On aurait donc besoin de plus d’eau (2x plus) pour arriver au même résultat. Donc c’est une problématique à prendre en compte là où les ressources en eau sont déjà limités.

L’électrolyse, si propre que ça ?

Électrolyse bas carbone

L’électrolyse n’émet pas de gaz à effet de serre directement. Mais comme pour la voiture électrique, il y a des émissions indirectes, liées à la production d’électricité. En effet, de l’électricité produite à partir de charbon sera beaucoup plus émettrice qu’une électricité produite à partir d’énergie solaire. Donc si la source d’énergie est bas carbone, l’électrolyse sera bas carbone.

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On gagnerait donc beaucoup à produire l’hydrogène via une hydrolyse issue d’énergies bas carbone. Mais est-ce aussi le cas pour le gaz naturel et le charbon ?

Électrolyse à partir d’énergies fossiles

En effet, lors de toute transformation physique ou chimique, il y a des pertes d’énergie. Donc l’énergie qu’on a après toutes les transformations est inférieure à l’énergie qu’on a initialement. C’est aussi le cas pour l’électrolyse : d’un côté, on utilise directement le gaz naturel pour faire de l’hydrogène, de l’autre on utilise ce gaz pour faire de l’électricité et on utilise cette électricité pour faire de l’hydrogène. On rajoute des étapes, donc des pertes, donc il faut plus de gaz pour la même quantité d’hydrogène à la fin, donc finalement plus d’émissions.

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On comprend alors qu’il vaut mieux directement utiliser du méthane (gaz naturel) ou du charbon pour faire de l’hydrogène, plutôt que d’utiliser une électrolyse qui utiliserait de l’électricité issue de ces énergies. Ces cas là sont hypothétiques, mais qu’en est-il de la production réelle ? Est ce que faire de l’électrolyse à partir du mix électrique européen vaut le coup au niveau du climat ?

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On émet donc plus de gaz à effet de serre en faisant une électrolyse à partir du mix électrique européen qu’en utilisant directement du méthane ! Donc si on résume, l’électrolyse apporte un véritable avantage au niveau des émissions de gaz à effet de serre seulement si elle est faite avec de l’électricité bas carbone. À l’heure actuelle, le mix électrique européen ne permet pas de concurrencer le vaporeformage du méthane au niveau des émissions de GES.

Émissions de GES liées à la production d’électricité en Europe : allez voir Electricity Map

Pour aller plus loin : Les alternatives de demain

Production bas carbone

L’Europe doit s’engager dans une diminution de l’utilisation des énergies fossiles pour respecter l’Accord de Paris. Il serait donc possible à termes d’avoir un mix électrique européen bas carbone. L’hydrogène deviendrait alors possiblement rentable au niveau climatique !

 

Craquage du méthane

Le principe du craquage du méthane et de casser la molécule de CH4 pour former de l’hydrogène et du carbone solide qu’on appelle “noir de carbone”. Non seulement on ne produirait pas de CO2 (donc pas d’émissions directes), mais en plus le noir de carbone peut être réutilisé dans l’industrie, (pneus, encres, …).

Si on choisissait de couvrir toute la demande en noir de carbone de cette façon, on pourrait assouvir 7% des besoins en hydrogène dans le monde.

 

Les cycles thermochimiques

L’objectif ici, c’est d’utiliser la chaleur pour casser la molécule d’eau à la place de l’électricité pour l’électrolyse. Cette solution est plus efficace que l’électrolyse, mais nécessite des températures très élevées, (2500°C). Elle est donc peu utilisée.

Conclusion

Actuellement, l’immense majorité de l’hydrogène est produit via des énergies fossiles. Cela rend la production d’hydrogène très émettrice en gaz à effet de serre.

Pour substituer cette production, l’idée de l’électrolyse est apparue dans les médias. Pourtant cette solution porte deux problèmes majeurs :

  • Il serait difficile (pas impossible) de dégager la puissance électrique nécessaire pour répondre entièrement aux besoins en hydrogène de cette façon
  • La façon de produire l’électricité utilisée dans l’électrolyse a un impact fort sur les émissions. Il vaut mieux utiliser directement du méthane qu’une électrolyse avec le mix électrique européen actuel !

Pour diminuer l’impact de la production d’hydrogène, il faudrait se tourner vers des moyens de production alternatifs, ou favoriser le développement des énergies bas carbone pour aller vers une électricité plus propre.

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